Le taux de chômage atteint un creux alors que la pénurie d’enseignants en Ontario s’aggrave
Le chômage chez les enseignantes et enseignants en début de carrière a reculé en 2021 pour atteindre son plus bas niveau en 15 ans. Les pédagogues qualifiés pour enseigner en anglais sont de nouveau en demande, tandis que la pénurie d’enseignants qualifiés pour enseigner en français et le français langue seconde (FLS) continue de s’aggraver. Les conseils scolaires de la province s’attendent à avoir de sérieuses difficultés à recruter du personnel.
de Frank McIntyre
Notre dernier sondage sur la transition à l’enseignement révèle que le taux de chômage des diplômés de l’Ontario en première année de carrière a chuté à 4 %. Seul 1 % des enseignants qui sont dans leur deuxième à cinquième année de carrière ont déclaré être au chômage. Ces taux sont en forte baisse par rapport aux années précédentes.
Chômage chez les diplômés de l’Ontario
1re année
- 34 % en 2014
- 14 % en 2017
- 4 % en 2021
2e à 5e année
- 17 % en 2014
- 7 % en 2017
- 1 % en 2021
Les taux de chômage sont faibles dans les quatre cycles de qualification. Ce qui est particulièrement frappant dans les résultats du dernier sondage est que le taux de chômage des enseignants en première année de carrière qualifiés pour enseigner aux cycles primaire-moyen a chuté à 2 %, soit une baisse importante par rapport au taux de 6 % de l’année précédente. Les pédagogues en première année de carrière qualifiés pour enseigner aux cycles intermédiaire-supérieur et l’éducation technologique ont également enregistré des gains importants, avec un taux de chômage de seulement 4 % et 3 % respectivement. Les enseignants en première année de carrière qualifiés pour enseigner aux cycles moyen-intermédiaire, quant à eux, ont rapporté un taux de chômage plus élevé par rapport à l’année dernière. En 2021, les taux de chômage pour les quatre cycles sont bien en deçà des taux supérieurs à 10 % qu’ont connus les enseignants en première année de carrière il y a tout juste quatre ans.
Taux de chômage des enseignants en première année de carrière en Ontario
Primaire-moyen
- 16 % en 2017
- 6 % en 2020
- 2 % en 2021
Moyen-intermédiaire
- 17 % en 2017
- 4 % en 2020
- 6 % en 2021
Intermédiaire-supérieur
- 15 % en 2017
- 8 % en 2020
- 4 % en 2021
Éducation technologique
- 15 % en 2017
- 15 % en 2020
- 3 % en 2021
Le taux de chômage des enseignantes et enseignants qualifiés pour enseigner en anglais en première année de carrière a considérablement baissé en 2021. Bien que des écarts persistent entre les taux de chômage des enseignants qualifiés pour enseigner en anglais et ceux qualifiés pour enseigner en français et le FLS, seuls 5 % des enseignants qualifiés pour enseigner en anglais en première année de carrière ont rapporté être au chômage en 2021, comparativement à 8 % en 2020 et à 19 % en 2017. Le taux de chômage des pédagogues qualifiés pour enseigner en français et le FLS se maintient à zéro ou à presque zéro depuis déjà plusieurs années.
Taux de chômage des enseignants en première année de carrière par langue de qualification
Enseignants qualifiés pour enseigner en anglais
- 19 % en 2017
- 8 % en 2020
- 5 % en 2021
Enseignants qualifiés pour enseigner le FLS
- 4 % en 2017
- 1 % en 2020
- 1 % en 2021
Diplômés d’un programme en français
- 0 % en 2017
- 0 % en 2020
- 2 % en 2021
Les enseignantes et enseignants qualifiés pour enseigner en anglais aux cycles primaire-moyen déclarent désormais un taux de chômage de seulement 3 % au cours de leur première année de carrière après avoir obtenu l’autorisation d’enseigner, soit une baisse importante par rapport au taux de 8 % rapporté en 2020. Au cours de la dernière décennie, époque du surplus d’enseignants, le taux de chômage des pédagogues qualifiés pour enseigner en anglais avait plafonné à 37 %. Ce surplus étant chose du passé, ces enseignants sont de nouveau très sollicités pour combler les besoins de la province.
En raison de la pénurie croissante d’enseignants en Ontario, un grand nombre d’enseignants en première année de carrière signalent moins de contrats d’emploi précaires. Ils ont été moins nombreux à faire de la suppléance au début de leur carrière – seulement 34 % au cours de l’année scolaire 2020-2021, contre 54 % en 2019-2020. Au moment du sondage de 2021, seuls 16 % des enseignants faisaient toujours de la suppléance à la journée à la fin de l’année scolaire. Près de la moitié (45 %) d’entre eux ont signalé avoir décroché un contrat de remplacement à long terme d’au moins 97 jours, contre 27 % en 2019, et 23 % ont obtenu des contrats à plus court terme.
Je n’ai eu aucun problème à obtenir un contrat de remplacement à long terme au début de l’année scolaire. Je n’ai même pas eu à faire de la suppléance cette année.
Diplômée en première année de carrière qualifiée pour enseigner aux cycles primaire-moyen, conseil scolaire de langue anglaise
Dans notre étude, nous demandons aux enseignantes et enseignants qui ont un emploi s’ils ont travaillé autant qu’ils le voulaient durant l’année scolaire. Les réponses au sondage de 2021 confirment une forte hausse d’enseignants déclarant le plein emploi. Contrairement à la première année de la pandémie de COVID–19, où les contrats de la plupart des suppléants à la journée n’ont pas été renouvelés après la fermeture des écoles en mars 2020, cette année, nous avons constaté que la plupart des pédagogues qui figuraient sur des listes de suppléance au moment du sondage ont conservé leur emploi lorsque les écoles ont de nouveau fermé leurs portes en avril 2021. Les conseils scolaires ont embauché la plupart d’entre eux pour conclure l’année scolaire en mode virtuel.
Plein emploi chez les enseignants en première année de carrière
- 80 % dans le sondage de 2021
- 60 % dans le sondage de 2020
- 81 % dans le sondage de 2019
- 62 % dans le sondage de 2017
En dépit de ces gains importants, la deuxième année scolaire touchée par la pandémie n’a pas été facile pour les enseignants en début de carrière en Ontario. De nombreux nouveaux diplômés ont fait face à des défis lorsque les conseils scolaires ont adopté des modèles d’enseignement en présentiel, virtuel et hybride. Les retards dans l’embauche et la compression des semestres ont ajouté au stress. Certains se sont inquiétés du fait que leur succès à obtenir un poste en enseignement serait de courte durée, car les enseignants expérimentés en congé pendant la pandémie finissent par retourner en classe.
Malgré les améliorations du marché du travail pour les nouveaux enseignants en 2021, l’offre de contrats permanents a reculé pour une deuxième année consécutive. Seuls 17 % des pédagogues en première année de carrière ont obtenu ces contrats surs en 2021, contre 22 % en 2019. Les incertitudes liées à la dotation en personnel, compte tenu de l’évolution et du manque de clarté relativement aux exigences quant à l’enseignement en présentiel, virtuel et hybride au cours des deux dernières années, peuvent avoir retardé les décisions d’embauche de personnel permanent et expliquer cette baisse signalée.
Les enseignants qualifiés pour enseigner en français et le FLS continuent à décrocher des postes permanents plus tôt dans leur carrière que leurs homologues qualifiés pour enseigner en anglais. Notre sondage de 2021 a révélé que 56 % des diplômés d’un programme en français avaient un poste permanent à la fin de leur première année d’enseignement, contre 25 % des enseignants qualifiés pour enseigner le FLS et seulement 10 % des enseignants qualifiés pour enseigner en anglais.
De récentes modifications apportées aux pratiques d’embauche en Ontario devraient accélérer la progression de la carrière des nouveaux enseignants dans les conseils scolaires de langue anglaise. Auparavant, la voie d’accès graduelle à un emploi permanent exigeait du candidat qu’il ait une vaste expérience en suppléance à la journée avant de pouvoir décrocher un contrat de remplacement à long terme, puis de postuler un emploi permanent. La suppléance effectuée n’était pas transférable d’un conseil scolaire à l’autre. La nouvelle politique met l’accent sur le mérite, la diversité et les besoins uniques des écoles et des communautés, plutôt que sur l’ancienneté pour l’octroi de contrats de remplacement à long terme et l’embauche pour pourvoir des postes permanents. Cela permet à tous les enseignants qualifiés de postuler des emplois dans n’importe quel conseil scolaire de la province.
Le taux de chômage des enseignantes et enseignants nouvellement arrivés au Canada ayant obtenu l’autorisation d’enseigner en Ontario continue d’être élevé au cours de la première année de carrière, et ce, malgré l’augmentation de la demande de nouveaux enseignants dans la province. Leur taux de chômage de 37 % en 2021 est plus de neuf fois supérieur aux 4 % déclarés par les diplômés d’un programme de formation à l’enseignement en Ontario.
En 2020-2021, les conseils scolaires de l’Ontario financés par les fonds publics de la province ont augmenté leurs parts d’embauche d’enseignants en première année de carrière. Les conseils scolaires de langue anglaise ont embauché 81 % des diplômés de l’Ontario, les conseils scolaires de langue française, 7 %, et les écoles indépendantes, 8 %. Seuls 3 % des diplômés de l’Ontario ont déclaré qu’ils enseignent à l’extérieur de la province.
En plus de recruter une plus grande proportion de diplômés de l’Ontario nouvellement certifiés, les conseils scolaires ont également fait appel aux étudiantes et étudiants en enseignement en 2021 pour remédier à la grave pénurie d’enseignants qualifiés disponibles pour pourvoir les postes de suppléance à la journée. Les certificats temporaires ont permis aux étudiants ayant terminé une bonne partie de leur programme d’aider à pallier la pénurie d’enseignants dans la province. Selon les résultats de notre étude, plus de 1 000 de ces enseignants qualifiés ont été embauchés dans toute la province au cours de la deuxième moitié de l’année scolaire 2020-2021. En fait, ils ont comblé les pénuries de suppléants à la journée en remplaçant le nombre croissant de diplômés de l’Ontario en première année de carrière qui ont obtenu davantage de contrats de remplacement à long terme que dans les années précédentes.
Les enseignantes et enseignants certifiés en Ontario chaque année sont soit diplômés d’un programme de formation à l’enseignement dans la province, soit formés dans d’autres provinces ou à l’étranger. Parmi les nouveaux enseignants formés à l’extérieur de l’Ontario, notons ceux qui ont migré dans la province, ainsi que les Ontariens qui ont obtenu leur diplôme en enseignement dans d’autres provinces, dans les collèges américains frontaliers et ailleurs dans le monde.
Nouveaux enseignants certifiés annuellement en Ontario
Formation à l’enseignement à l’extérieur de l’Ontario
- 3 038 entre 2008 et 2011
- 1 647 entre 2012 et 2014
- 1 214 entre 2015 et 2018
- 1 124 entre 2019 et 2022
Diplômés d’un programme en Ontario
- 9 100 entre 2008 et 2011
- 8 340 entre 2012 et 2014
- 5 588 entre 2015 et 2018
- 4 671 entre 2019 et 2022
Moyenne annuelle de nouveaux enseignants
- 12 138 entre 2008 et 2011
- 9 987 entre 2012 et 2014
- 6 802 entre 2015 et 2018
- 5 795 entre 2019 et 2022
Au cours de la dernière décennie, le nombre annuel de nouveaux enseignants certifiés a chuté pour chacune de ces sources. Le nombre annuel de nouveaux enseignants provenant des facultés d’éducation de l’Ontario représente maintenant environ la moitié du nombre de ceux qui ont intégré le marché du travail entre 2008 et 2011. Le nombre de nouveaux enseignants formés à l’extérieur de la province a chuté à près d’un tiers du niveau de ces années antérieures.
Les enseignants au chômage pendant les années de surplus de personnel enseignant de la dernière décennie ont maintenant quitté la province ou la profession ou ont fini par trouver des emplois en enseignement en Ontario, car l’offre de nouveaux enseignants a diminué au cours des six dernières années. Le marché du travail pour les pédagogues de l’Ontario continue de se resserrer. Notre analyse des résultats du sondage de 2021 et des données de notre tableau public révèle que moins de 400 diplômés de l’Ontario en début de carrière au chômage seront disponibles pour pourvoir des postes en enseignement dans la province en 2021. En comparaison, on estimait à plus de 7 700 le nombre d’enseignants au chômage au plus fort du surplus d’enseignants en Ontario en 2014. Entretemps, les prévisions annuelles de nouveaux enseignants ne suffisent pas à pourvoir les postes qui seront laissés vacants en raison des départs à la retraite, de la croissance des inscriptions dans certaines régions et des départs précoces d’enseignants.
L’intérêt pour la formation en enseignement a diminué, alors que le chômage des pédagogues en début de carrière a augmenté durant la première moitié de la dernière décennie. Le nombre de postulantes et postulants issus des programmes consécutifs est passé de plus de 12 000 par an en 2010 à environ 9 500 en 2014. Avec la pénurie persistante de postes et l’introduction du programme de formation à l’enseignement en quatre sessions, le nombre de postulants a chuté à environ 4 300 en 2015 et en 2016. Depuis, grâce à l’augmentation de la demande d’enseignants en Ontario, le nombre de postulants s’est accru. Plus de 7 400 personnes ont présenté une demande d’admission aux programmes consécutifs menant à un B. Éd. en 2021.
Ce regain d’intérêt laisse présager qu’un plus grand nombre d’Ontariennes et d’Ontariens embrasseront la carrière d’enseignant dans les années à venir. Pour que cela puisse se réaliser, on peut ouvrir davantage de places dans les programmes de formation à l’enseignement de l’Ontario, augmenter le nombre d’inscriptions d’Ontariens dans les programmes des collèges frontaliers américains, au Royaume-Uni et ailleurs à l’étranger, comme par le passé, ou combiner ces différentes voies d’entrée pour les nouveaux enseignants.
Entretemps, bien que ces filières puissent prendre de l’expansion et produire des cohortes plus importantes d’enseignants nouvellement certifiés, les prochaines années seront difficiles pour les conseils scolaires de l’Ontario. La pénurie de pédagogues augmentera dans les conseils scolaires de langue française. De nombreux conseils scolaires de langue anglaise n’auront pas suffisamment d’enseignants de FLS pour assurer la prestation de ces programmes très demandés. Les conseils scolaires de langue anglaise continueront d’être confrontés à des pénuries chroniques de suppléants à la journée, ainsi qu’à une concurrence accrue pour pourvoir certains postes vacants à l’élémentaire et au secondaire, qu’il s’agisse de contrats de remplacement à long terme ou de postes permanents.